Mathieu Agopian : La technique pomodoro : retour après deux semaines d'utilisation

Voici deux semaines maintenant que j'ai décidé d'essayer la technique Pomodoro de gestion du temps. En attendant le retour d'expérience au bout d'un mois (cf le 30 days to success), voici déjà mes réflexions à mi-chemin.

Le principe

Il est simple, très simple, et c'est d'ailleurs un des points forts de cette technique : la facilité de compréhension et de mise en œuvre.

Voici la traduction de ce qu'on peut trouver sur la page d'accueil du site de la technique :

  1. choisir une tâche à accomplir
  2. régler le Pomodoro sur 25 minutes (le Pomodoro est le minuteur)
  3. travailler sur la tâche jusqu'à ce que le Pomodoro sonne, et faire une croix sur une feuille de papier
  4. faire une courte pause (5 minutes)
  5. tous les 4 Pomodoros, faire une pause plus longue (30 minutes)

On peut ensuite rajouter quelques points à faire dans la journée :

Les points positifs

Commençons par les bons côtés :

La gestion des interruptions

Et c'est pour ce point en particulier que je comptais sur la technique Pomodoro, et je ne suis pas déçu. De nos jours, surtout si on est présents sur les réseaux sociaux (twitter pour ma part), sur irc, qu'on suit des flux RSS, ou même seulement si on surveille ses mails, on est baignés dans un flot d'informations. Ce flot n'est pas passif, puis qu'il y a de très nombreuses notifications possibles, entre celles du navigateur, de clients divers, de "highlights" irc...

Or là, la règle est simple : pendant un Pomodoro, on reste concentré sur la tâche qu'on s'est assignée, et on ignore les notifications. Et il est beaucoup plus facile de les ignorer si on sait qu'on pourra y succomber dans x minutes. Dès lors, on travaille d'une traite pendant 25 minutes, et la productivité augmente.

Comptabiliser le temps passé

Rien de plus facile : en fin de journée, il suffit d'additionner les petites croix tracées sur sa feuille pour savoir qu'on a travaillé n * 30 minutes. Je compte toujours les 5 minutes de pause dans le temps de travail, car sans ces pauses, il ne serait pas possible de rester concentré et productif. De la même manière qu'un employé de bureau ou un ouvrier ne va pas décompter ses pauses café, je ne décompte pas ces pauses qui sont, j'en suis persuadé, indispensables au bon déroulement d'une journée de travail.

Aide à l'estimation de la durée d'une tâche

En temps qu'informaticien, on me demande constamment des estimations de durées : que ce soit pour régler un problème, implémenter une nouvelle fonctionnalité, expérimenter de nouvelles solutions ... et ce, pour un devis, pour avoir une date de mise en production ...

Lorsque je rajoute une tâche dans ma liste, j'y met une estimation en nombre de Pomodoros. Je peux ainsi voir les écarts entre cette estimation et le temps qu'il m'a fallut en réalité en fin de journée. Et j'ai bon espoir que cet écart baisse avec l'exercice !

Aide à l'organisation

J'imagine que tout le monde à déjà entendu parler du GTD, cette méthode qui permet de s'organiser afin de "faire les choses". Eh bien avec la technique Pomodoro, j'ai déjà une liste de tâches à faire, et une liste de tâches que j'ai prévues pour la journée. Il y a pas mal de points communs, et je pense que les adeptes de la méthode GTD peuvent y trouver leur compte.

Les points négatifs

Du côté des points négatifs, voici ceux que j'ai pu lister jusqu'à présent. Je n'utilise la technique que depuis deux petites semaines, et concerne principalement les soucis que j'ai rencontrés lors de l'application de la technique à mon emploi en télé-travail.

Les 25 minutes de Pomodoro

25 minutes de travail, de concentration, puis 5 minutes de pause. Et 30 minutes de pause toutes les deux heures. Sauf que c'est pas toujours aussi évident.

Je me retrouve sans cesse confronté à des tâches qui me demandent "juste une minute de plus". Une minute de plus pour envoyer un mail de notification suite à un problème résolu. Ou une minute de plus pour mettre en production une fois que tous les tests sont passés. Je dis une minute, mais ça peut être 2 minutes, voire 5 ... où s'arrêter ? A quel point il faudrait plutôt faire une pause, et y passer un Pomodoro de plus ?

Lorsqu'une tâche est plus courte qu'un Pomodoro, il est conseillé de "sur-apprendre", de mettre à profit ce temps pour perfectionner son geste. Il m'est arrivé, pour un Pomodoro où il me restait 15 minutes, de refaire mon système de déploiement (merci Fabric). Super ! sauf que du coup j'ai enchaîné sur un Pomodoro supplémentaire (non prévu en début de journée), pour finaliser la réécriture de mon fabfile.

Les pauses

Pour continuer sur le point précédent, je trouve ça parfois très dur de prendre la pause de 5 minutes. Si je suis concentré, dans le flow, il m'est très difficile de m'interrompre pour cette pause.

Si il ne manque qu'une minute, je suis tenté de continuer pour terminer (et je le fais très souvent). Si je suis vraiment bien lancé, j'ai parfois peur que la consultation de mes mails/irc/twitter/rss me déconcentrent, me fassent sortir de mes rails, et que du coup ce soit plus difficile de m'y remettre pour terminer ce que j'avais commencé.

Travaillant de la maison, je n'ai toujours pas réussi à respecter les pauses de 30 minutes. Comme il m'arrive de devoir travailler sur des tâches non prévues, et trop courtes pour mériter un Pomodoro (réponse à un mail pro par exemple), je déborde sur les pauses de 5 minutes, en me disant que je me rattraperais avec ma pause repas par exemple.

Dans d'autres cas, j'arrête tout simplement le timer à la fin d'un Pomodoro (pause repas, vaisselle, allumer un feu...), et je zappe la pause (de 5 minutes ou de 30 minutes, selon les cas). Mais du coup, je pense perdre les avantages et la satisfaction de l'enchaînement de Pomodoros.

Les interruptions

Je suis en télé-travail, et il m'arrive, en général deux ou trois fois dans la journée, d'avoir des interruptions de collègues de travail qui ont besoin de moi. Ce peut être par skype ou téléphone, et c'est en général difficile à reléguer à la fin d'un Pomodoro : si il me reste 15 minutes avant la fin, je ne peux pas "mettre en pause" mon collègue qui a ses tâches à lui.

Ces interruptions peuvent être très courtes (quel est mon mot de passe pour le serveur bidule?), ou plus ou moins longues (on a un serveur en rade, tu peux t'y coller de suite?). Que faire dans ce cas ? En théorie, je dois interrompre mon Pomodoro et le "perdre", mais du coup je ne peux plus me servir du nombre de Pomodoros effectués dans la journée pour suivre le temps travaillé, et il me faut alors me servir d'un outil supplémentaire (le projet hamster par exemple).

Pour le moment en tout cas, je met le minuteur en pause, et le recommence après l'interruption, si elle a été assez courte et assez peu "mentale" pour ne pas m'avoir déconcentré.

Le pomodoro effectué est une victoire, pas un échec

En tout cas, en théorie, c'est comme ça que je devrais le ressentir. Le slogan de la technique Pomodoro, c'est de faire du temps un allié. Or quand je vois que je viens de finir un Pomodoro (de plus!) sur une tâche que j'avais sous-estimée, je culpabilise. Et je rechigne à repartir pour un Pomodoro supplémentaire.

Il faut que j'apprenne à voir un Pomodoro effectué comme une réalisation, une victoire, une bonne chose de faite. Et si j'ai sous-estimé la tâche, que cela me serve de leçon pour la prochaine.

Les points à travailler

Il me reste encore deux bonnes semaines avant mon prochain point et retour sur expérience. D'ici là, il faut que je travaille sur :

Je sais qu'il y a au moins une personne qui serait intéressée par le dernier point : @dzen a plusieurs fois émis l'idée de synchroniser les Pomodoros entre utilisateurs du salon irc ;)

Conclusion

On m'avait prévenu, mais j'ai quand même été surpris : on fait beaucoup moins de pomodoros qu'on imagine ! Je me met devant le PC vers 6h le matin, et j'arrête ma journée de travail vers 20h (quand ça se passe bien ;). Je dois donc passer plus de 12h devant le pc, et en comptant large sur les pauses et interruptions, je pensais être productif au moins pendant 8 à 9 heures.

Et bien au final, sur les deux semaines passées, je suis en général entre 10 à 12 Pomodoros par jour, si je ne compte que les 5 jours de semaine. Ce qui fait donc entre 5 et 6 heures de productivité par jour.

A cela il faut bien entendu rajouter toutes les interruptions téléphoniques, le temps passé à répondre aux mails, la comptabilité... toutes ces tâches que je ne me vois pas (pour l'instant?) consigner dans des Pomodoros, mais que du coup, je ne compte pas non plus dans mon "temps travaillé" en fin de journée.

Ah, et pour les malins qui me diront que le pluriel de Pomodoro, c'est Pomodori, je leur répondrais que :

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